Marques - Le Bon, la Brute et le Truand

Beaucoup trop fréquemment, on nous signale des sites Web vendant le navigateur Mozilla Firefox, utilisant les marques commerciales de Mozilla pour promouvoir d'autres produits ou services, ou utilisant des versions modifiées des marques de Mozilla. Le problème est que ces activités sont trompeuses, nuisent aux utilisateurs, embrouillent le consommateur et mettent en péril l'identité et le sens des marques Mozilla – sans parler d'être illégales. Les cas semblent tomber dans trois différentes catégories que j'appellerai le bon, la brute et le truand. Quand nous recevons des rapports ou identifions des activités problématiques, nous « faisons preuve d'une diligence raisonnable, de précaution et de prudence »1, ce qui veut dire que nous analysons les rapports et traitons chaque cas différemment selon le but et la gravité de la question.

Le Bon. Il y a une catégorie de cas qui impliquent de bonnes intentions, mais une utilisation inappropriée des marques. Généralement, ces personnes soutiennent vraiment le projet, la marque et la mission, et dans leurs efforts pour solliciter les autres et partager leur enthousiasme pour les produits, ils ont pu utiliser des marques de façon inappropriée. En vérité, nous avons la chance d'avoir ce problème, car il indique que les gens s'intéressent à ce que nous faisons. C'est presque toujours facilement corrigé par un coup de téléphone ou un simple mot. Ces questions ne sont à mon avis pas inquiétantes, car elles sont le signe du désir des utilisateurs d'adopter les marques d'une manière qui soit pertinente et significative pour eux. Maintenir la protection des marques (pour une bonne hygiène de marque) et avoir des supporters qui adoptent la marque ne devrait pas être mutuellement exclusifs ni contradictoires. Le droit des marques tel qu'il existe aujourd'hui est techniquement plus contraignant, mais je souhaite le voir évoluer pour reconnaître ces concepts complémentaires. Pour plus de perspectives sur le droit des marques, voir un article récent que Tiki Dare et moi avons écrit sur ce sujet dans l'International In-house Counsel Journal.

La Brute. Cette catégorie comprend les personnes qui font intentionnellement commerce de la marque pour leur propre bénéfice. À l'origine, ces cas sont basés sur les personnes ou entités se faisant passer pour Mozilla. Le problème pourrait se manifester comme du détournement de nom de domaine, en utilisant les marques pour promouvoir d'autres produits ou en manipulant les termes de recherche pour acquérir du trafic Web et des utilisateurs. Certains calculs estiment que 2 à 7 millions d'utilisateurs potentiels de Firefox par an sont détournés vers ces sites frauduleux. C'est particulièrement choquant car ces acteurs font du commerce sur la valeur de la marque Firefox construite par la communauté et trompent des utilisateurs dans la manœuvre.

Le Truand. Ces cas concernent une intention précise de tromper, de manipuler et de voler d'une façon très organisée. Ils représentent une forme d'escroquerie et souvent comprennent également d'autres logiciels, et semblent faire commerce de logiciels gratuits, qu'ils soient libres ou partagiciels (shareware). Souvent, les identités de ces contrevenants sont intentionnellement cachées sous des couches d'entreprises à travers plusieurs pays. Quand nous pouvons vérifier leur identité, nous les notifions et tentons d'abord de régler le problème à l'amiable. En réponse, nous obtenons généralement le traditionnel refus. Je me demande parfois pourquoi on passe par cette étape : s'ils ont mis en place un dispositif compliqué pour cacher leur identité pour voler les gens, pourquoi arrêteraient-ils de le faire si on leur demande gentiment ? Pire, ces sites peuvent également continuer à débiter la carte de crédit de l'utilisateur, même après que l'utilisateur se rend compte de la tromperie et annule l'abonnement.

Beaucoup d'entre vous nous ont envoyé des liens sur les sites que vous suspectez d'enfreindre nos droits. Je vous en remercie. Nous avons en permanence 50 - 70 affaires faisant l'objet d'une enquête. Aussi, nous disposons maintenant d'un endroit central où tout le monde peut signaler de tels sites. Plus vous nous fournissez d'informations lorsque vous déposez le rapport, plus il est facile d'évaluer et de réagir de façon appropriée.

Quand nous faisons face à la brute et au truand et qu'il n'est pas possible d'arriver à un accord avec les responsables, il est parfois nécessaire de recourir aux remèdes légaux. Cela peut comprendre une action en justice ou des procédures administratives le cas échéant. Par exemple, si une lettre de cease and desist 2 ne fonctionne pas, nous avons mis en place des procédures UDRP à l'OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle). Dans quelques juridictions, nous avons déposé et obtenu des injonctions pour obliger le contrevenant à l'arrêt. Étonnamment, parfois une ordonnance du tribunal n'est même pas suffisante. Jusqu'à présent, les actions initiées ont été couronnées de succès. Récemment, nous avons récupéré un tas de domaines des suites d'un détournement de domaine (hijacker) et dans d'autres actions, nous avons obtenu des injonctions préliminaires contre des opérateurs de sites Web se livrant à des pratiques frauduleuses. Dans presque tous ces cas, un membre de la communauté a signalé le problème ou il a même pu être d'abord signalé dans les médias.

Ces actions ne sont pas seulement coûteuses et chronophages, mais elles nous détournent de notre objectif principal. Malheureusement, c'est un domaine où je prévois une croissance continue et des efforts continus pour défendre le sens des marques. Avoir le soutien et l'aide de notre communauté rend notre travail plus facile et plus intéressant.

Harvey Anderson, VP and General Counsel of Mozilla Corporation

Traduction de « Trademarks – the Good, the Bad and the Ugly » du 20 avril 2009, par Mozinet, relecture Bruno Ethvignot et Tristan Nitot (Mozilla).


Note 1 : dans la version originale : “exercise due diligence, care and prudence”.

Note 2 : injonction de cessation et de désistement d'action.

Version PDF réalisée rapidement avec Google Docs.
hja' blog, Trademarks – the Good, the Bad and the Ugly, 20 avril 2009, Harvey Anderson